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  • Sven

« Les Tours de Farnèse », écrire l'enfermement


La stase

Les années de stase, ce sont ces années que l’on passe plongé-e dans l’incertitude profonde, dans le désarroi que représente le passage entre la fin de l’adolescence et le début de l’âge adulte, si l’on admet un instant de distinguer deux périodes qui ne sont, en définitive, que l’envers et l’endroit d’une même tranche de vie. La « stase » renvoie alors à ce sentiment de latence que nous éprouvons à chaque fois qu’il nous incombe de faire un choix, insignifiant ou crucial. Quelle ironie, quand on considère le fait que la « stase » (στάσις), dans l’Athènes de jadis, prenait le sens on ne peut plus éloigné de tempête, de tourmente et de dissension... De l’éphèbe désœuvré à la badine flâneuse, nombreuses sont les incarnations de ce Janus bifrons nommé Jeunesse.



Les Tours de Farnèse

Dans la Chartreuse de Parme, lorsque le héros Fabrice del Dongo est fait prisonnier et jeté dans la tour de Farnèse, tout nous indique qu’il passera le restant de ses jours à y croupir misérablement. Au moyen de nombreux subterfuges, il parvient cependant à garder contact avec l’extérieur et son salut porte le nom de Clélia Conti, qu’il aperçoit se divertir dans sa volière et dont la vue quotidienne le brûle à petit feu des flammes d’un amour naissant. En ces jours d’enfermement, trouvons, nous aussi, un moyen de rêver dans nos tours de Farnèse respectives.

LES TOURS DE FARNESE

à chacun sa prison, à chacun son enclos à chacun ses laments, à chacun ses sanglots

coulant en rivières, en fleuves, en flots

c’est en rond que l’on tourne

que l’on marche, que l’on pense

en vain que l’on rêve de Turin

de Milan, de Rome et Livourne

à chacun sa prison, à chacun son enclos à chacun ses laments, à chacun ses sanglots

coulant en rivières, en fleuves, en flots

paradis proposés par de piètres papiers

s’écroulant quand on les effleure

l’impassible cadran n’est que marbre et acier

l’horloge, narquoise, sait bien que l’heure leurre

à chacun sa prison, à chacun son enclos à chacun ses laments, à chacun ses sanglots

coulant en rivières, en fleuves, en flots.

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