Alien, Pirates des Caraïbes, et le syndrome d'Hollywood
- Jude
- 25 juin 2017
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 12 juil. 2023

Alien : Covenant et Pirates des Caraïbes : La Vengeance de Salazar ne sont pas d'affreux navets.
Les deux méga-blockbusters du moment remplissent au fond plutôt bien voire très bien leur mission première : divertir, faire passer un assez bon moment, séduire le plus large public possible, afin de grimper très haut au box-office.
Ridley Scott est un bon réalisateur et n'a pas tout à fait perdu la main, il y a quelque chose d'intéressant -mais de très inachevé- dans l'aspect apocalyptique de son film avec notamment une première séquence aussi fascinante qu'esthétisante, et son mythique monstre est toujours captivant et effrayant.
On a aussi toujours plaisir à revoir ce bon vieux Jack Sparrow, plaisir aussi à entendre à nouveau cette bonne vieille musique rythmer ces bonnes vieilles séquences d'action sublimées par ces bons vieux effets spéciaux, et Javier Bardem fait décidément, de No Country for Old Men à ce film en passant par Skyfall, un excellent méchant.
Mais les deux métrages marquent aussi et surtout par leur absence totale de créativité et de renouveau : c'est bien simple, ils n'inventent rien : presque tous leurs plans semblent déjà vus ailleurs et surtout dans les volets précédents.
Pire, les seules idées nouvelles nuisent en fait considérablement aux sagas respectives : à éclairer la moindre zone d'ombre des dites sagas, à vouloir en expliquer le moindre non-dit, le moindre mystère, le moindre secret, les deux films en ôtent en fait toute saveur, détruisant méthodiquement une grande partie de ce qui faisait leur intérêt -particulièrement pour Alien, ce qui est d'autant plus étonnant et triste que c'est Scott lui-même qui,, sous prétexte de vouloir l'enrichir et l'approfondir fait un mal fou à son œuvre, qui reposait largement sur cette part d'inconnu.

À travers ses deux étendards du printemps, c'est Hollywood qui montre son insigne faiblesse du moment, cette panne de créativité terrible qui le pousse ces dernières années à se recroqueviller tristement dans le passé et à ne produire -presque- que des remakes ou des suites sans fin, quitte à attenter gravement à certains de ses monstres sacrés; Star Wars en est évidemment la plus flagrante illustration.
Le cinéma étant en grande partie un art de codes, on peut -voire on doit- évidemment se tourner vers ce que le passé a de meilleur pour créer - Damien Chazelle en a fait le brillant étalage avec le génial La La Land - mais il faut aussi parfois briser les codes, en inventer de nouveaux – comme l'avait fait le Nouvel Hollywood de Coppola, Scorsese, Cimino, Spielberg, ou encore Lucas, dernière immense période hollywoodienne.
Au moins, il faut savoir les chefs d'oeuvre -et même les (très) bons films/bonnes sagas, ce qui correspond mieux à Pirates des Caraïbes notamment- en paix.
Je ne suis certainement pas de ceux qui crient à la mort ou même au déclin du cinéma, le cinéma va très bien, que ce soit quantitativement -il y a toujours plus de films d'horizons toujours plus divers et variés sur nos écrans- que qualitativement -il sort chaque année des chefs d'oeuvre.
Même au pays de l'Oncle Sam, James Gray (qui parle très bien de la morne période que traverse Hollywood, voir son entretien pour le magazine français Society) avec The Lost City of Z, Barry Jenkins avec Moonlight ou encore Matt Ross avec Captain Fantastic ont montré que le cinéma américain (indépendant) pouvait encore être audacieux, ambitieux, émouvant, excellent.
Simplement, les oracles de la mort du cinéma doivent être de ceux qui ne regardent plus ou moins que du côté d'Hollywood, or il faut bien constater et dire que le plus mythique et emblématique ensemble de studios du septième art traverse sans doute la pire période de son histoire.
Jude
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