Moonlight, brillant
- Jules
- 21 févr. 2017
- 4 min de lecture

ATTENTION ! Cet article contient quelques spoilers sur l'histoire du film (mais bon même si vous avez pas vu le film lisez l'article il est vachement bien ;-))
Moonlight est je pense le premier long-métrage à traiter de l'homosexualité entre deux afro-américains. Pourtant, on pourrait se dire « Et alors, qu'est-ce que cela change » ou encore « Et pourquoi pas », si seulement la mise en scène du film ne tendait pas à rendre ce point du scénario essentiel. En effet, dès le début le réalisateur souhaite nous faire comprendre qu'assumer son homosexualité n'est pas chose aisée, surtout dans un tel contexte. Le personnage principal, Chiron, un garçon âgé d'environ 8 ans habite dans les quartiers mal famés de la ville de Miami avec sa mère. A l'école, il est le souffre-douleur de ses camarades et il s'est forgé un caractère très introverti afin de se protéger des multiples discriminations qu'il subit au quotidien. Ainsi, la question du racisme est bien présente dans le film mais ne sert que d'arrière-plan à l'histoire, comme si cette problématique était déjà acquise et qu'elle ne faisait que s'ajouter aux autres problèmes de Chiron. En plus de cela, sa mère se drogue et cela a des conséquences sur sa façon d'éduquer son fils. En effet, le garçon délaissé par sa mère tentera de trouver une personne de confiance, quelqu'un sur lequel il pourra s'appuyer lorsqu'elle sera absente pour répondre à ses questions. Il trouvera donc un réconfort chez Juan, un dealer qui n'en a pourtant pas du tout l'air et qui permettra à Chiron de trouver sa voie et d'être un peu plus sûr de lui.
C'est là que débute donc réellement le film, lorsque le jeune garçon commence à assumer ses différences et lorsqu'il se prépare à prendre son indépendance. On le retrouve en tant qu'adolescent et lâché dans une société qui ne l'accepte pas encore, sans son fidèle appui, Juan étant décédé. Il va alors devoir jongler entre sa mère qui tombe de plus en plus dans les travers de la drogue et ses camarades qui n'acceptent pas son « manque de virilité ». Pourtant, il va enfin tomber sur un ami le comprenant et avec qui il testera sa première expérience homosexuelle. Le spectateur se dit alors que Chiron est libéré et qu'il peut enfin assumer pleinement son statut de gay, jusqu'à ce qu'une bagarre avec son petit ami vienne tout remettre en cause.
Enfin, la dernière partie nous dévoile un Chiron totalement différent de ce que l'on avait vu précédemment, devenu gangsta et lui-même dealer de drogue. Arborant ses dents en or, il semble alors incarner le parfait homme viril dont personne ne pourrait penser qu'il est homosexuel. C'est là que le réalisateur joue un pari risqué mais réussit à conserver une cohérence régulière en équilibrant parfaitement le comportent de son personnage. On se rend alors compte que le jeune homme est resté fidèle à lui-même mentalement mais qu'il garde un souvenir traumatisant de son adolescence, l'empêchant ainsi de s'assumer normalement. L'apparence physique du gaillard est alors toute trouvée et témoigne amplement du manque de confiance en soi de Chiron. Puis finalement le surnommé « Black » va reprendre contact avec son ami d'enfance et remettre les choses à plat pour pouvoir s'épanouir avec lui de nouveau.
C'est donc un magnifique portrait de que nous offre le réalisateur avec une évolution de personnage maîtrisée à la clé. Seul petit bémol qui m'a fait réagir à la fin de la projection, l'ambiance un peu trop clichée et malaisante qui place la dernière partie du film un peu en-deçà des deux précédentes.
En revanche, que dire de la performance de Barry Jenkins derrière la caméra ! Les images sont tout à fait sublimes et mettent très bien en lumière (c'est le cas de le dire;-)) la performance des acteurs. En effet, le réalisateur a choisi de beaucoup jouer sur les codes couleurs avec son long-métrage. Comme il le dit, « la nuit, les Noirs paraissent bleus ». Et il va jouer dessus tout au long de la pellicule, imprégnant son image de nuances bleutés dans les scènes douces de la nuit. Puis, lorsqu'il sera question de montrer la défaillance et l'esprit torturé de la mère de Chiron, ce seront des couleurs plus négatives et destructrices qui prendront le pas, tel que le pourpre ou l'obscurité.
Autre point (attention, jeu de mot en approche) : le point. En effet, dans Moonlight Barry Jenkins a choisi d'utiliser la plupart du temps des longues focales. Cela implique donc que les acteurs ne sont nettes que dans une zone restreinte de l'espace filmé. Ce jeu sur la profondeur de champ nous permet donc de nous focaliser (décidément je ne m'arrête plus :-D) sur un personnage donné et d’occulter le décor ou les autres personnages. Ainsi, la réalisation au service de la mise en scène, cela permet d'isoler encore plus Chiron de son environnement extérieur et d'illustrer son détachement avec le monde qui l'entoure.
En conclusion Moonlight est un film à aller voir tant pour son histoire touchante et originale que pour sa réalisation travaillée et efficace. Allez, filez dans les salles obscure !
Jules
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