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Après ce déluge...

  • Ella
  • 10 nov. 2016
  • 3 min de lecture

Dessin de Mari Andrew, dessinatrice américaine plutôt super

J'ai vu des enfants dans le métro, deux filles et des garçons, ils revenaient d'un anniversaire sûrement, une dizaine, noirs ou métis la plupart mais aussi deux petits blancs. Ils échangeaient leurs cartes de foot et se demandaient si ils avaient tels ou tels joueurs, ils étaient tous petits de taille mais sûrement en CE2 ou quelque chose comme ça, un grand frère d'une quinzaine d'années les accompagnait. Leur joie, leur insouciance, la manière dont ils lançaient "J'ai trop faim" "T'as Gignac ? Qui ? Gignac ! Mais non j'ai que Pogba j't'ai dit !"... Une petite avait un bonnet de Noël, elle négociait avec un copain qui, la draguant avec sa balle rebondissante, se réjouissait du joueur qu'il ajouterait bientôt à sa collection. Ils parlaient, lançaient des phrases légères qui s'envolaient et dansaient dans l'air lourd du métro silencieux, se dissipaient pour laisser place à d'autres plus insignifiantes encore, mais qui raisonnaient avec plus de douceur et d'innocence que toutes les précédentes. "Poualala, Griezmann !" Lançait un garçon à Julien, son copain collé à lui sur leur siège-pour-trois. "Lui, il pèse 73 kilos !" "Wahou... Murmura une petite fille, penchée pour apercevoir le chiffre sur la carte. "73 kilos..." Répéta sa copine, les yeux dans le vague. Je les ai vu s'amuser, parler, trois stations, leurs pieds ne touchaient même pas le sol quand il étaient assis, dans leurs petites doudounes... J'ai souri, en les écoutant, mais j'ai eu mal en pensant à des enfants semblables nés aux Etats Unis. J'ai pensé à la manière dont les gens bientôt les regarderaient, quand leur président aurait parlé d'eux en disant "migrants", "délinquants", "dangereux", j'ai pensé au futur de ce petit groupe en France et j'ai croisé les doigts pour qu'ils restent aussi heureux le plus longtemps possible, qu'ils restent unis et mélangés, j'ai pensé à tout ce qu'il s'était passé aujourd'hui dans le monde et j'ai regardé les gens autour de moi. D'origine indienne, maghrébine, française, des âgés et des jeunes, des femmes et des hommes nous entouraient. Je les ai regardé, donc, et je me suis dit qu'ils ne voteraient pas comme les américains, pour une personne les condamnant à la honte, au soupçon des uns envers les autres, à la peur et la précarité, à la discrimination, aux inégalités qui se creuseraient entre eux. Mais aujourd'hui nous a prouvé que tout était possible, parce qu'hier des gens ont voté pour leur avenir et ils l'ont fait pour la plupart en fermant les yeux sur les abominations dont ils, ou leurs concitoyens, leurs voisins, allaient bientôt être objets et victimes, d'autres pensaient faire le bon choix pour eux, seulement pour eux, mais se trompaient, parce qu'élire Donald Trump ne sera bénéfique à personne, si ce n'est une poignée de chef d'entreprise multi-millionnaires...

Mais on ne pourra pas dire qu'ils ne savaient pas. Non, parce que la seule chose qu'on peut lui accorder à ce "45e président" c'est le fait qu'il soit clair dans ses propos.

Seulement 54% des américains se sont bougés, mais ils l'ont choisi, lui, et c'est à nous de voter en masse quand notre tour viendra, c'est à nous de mobiliser tout le monde autour pour les envoyer prendre deux minutes au bureau de vote pour arrêter d'être passif, pour arrêter de mettre la faute sur les autres et pour s'armer enfin d'une putain de conscience politique, pour arrêter de laisser des ignorants décider à la place des autres.

C'est à nous d'éviter d'élire un candidat qui nous divisera, qui ira à l'encontre de nos principes et de nos "valeurs", liberté égalité fraternités chéries, d'éliminer un candidat qui nous condamnera à la peur, à l'oppression, à la régression politique. Soyons conscients de ce qu'il se passe dans le monde et choisissons avec le cœur, celui qui fera le maximum pour unir au lieu de désolidariser, pour aider au lieu de renvoyer, pour comprendre au lieu de parler. Personne n'est parfait, cette nuit lugubre nous l'a prouvée, et le rêve américain n'est peut-être finalement pas si réaliste, les États-Unis ne sont malgré tout peut-être pas si tolérants, si évolués. Maintenant qu'on sait ça, qu'on a ça sur les mains, limitons les dégâts. Votons. Votons bien.

Ella

 
 
 

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