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Cauchemar national

  • Ella
  • 18 juil. 2016
  • 2 min de lecture

Je me suis réveillée tard, ce matin chaud du 15 juillet. J'ai regardé l'heure, 12h46. Mon frère était sur son iPad. Je me suis tournée vers lui, j'ai dit "on va pas à la plage ?".

Il m'a regardé et a sourit, comme s'il compatissait. "Tu ne sais pas ce qu'il s'est passé hier soir. Regarde, ou bien, tu veux que je te dise ? Tu ne verras que ça, de toute façon."

J'ai paniqué, j'ai foncé sur mon téléphone et j'ai regardé. J'ai fait défiler les images de mon fil d'actualité, sans comprendre. Et puis elle est arrivée, la photo "Pray for Nice", elle s'était infiltrée dans le paysage habituel de selfies, elle s'était insérée parmi les feux d'artifice.

J'aurais préféré ne jamais savoir, j'aurais préféré me réveiller et apprendre que les horaires de bus ont changé, qu'on va à la plage après manger. J'aurais préféré avoir mal dormi et m'être réveillée tôt, j'aurais préféré avoir le bus de 10h pour découvrir la plage vide, pour profiter tôt de la Méditerranée tiède.

Je crois que j'aurais préféré apprendre ça autrement.

Parce que devoir taper "Nice" sur internet, pour voir tous les journaux du monde relater les mêmes événements, le même nombre de victimes, des dizaines de fois, c'est horrible. C'est une des pires situations je crois, de découvrir les informations en retenant son souffle, d'aller sur un autre site en espérant en apprendre plus, en espérant découvrir des données un peu atténués, un peu plus rassurantes.

Et puis je me suis tournée, j'ai regardé Jude et il est venu à côté de moi, je crois qu'on a regardé les articles ensemble un moment, pendant que les larmes coulaient et que je comprenais, que je prenais conscience.

Alors comme ça hier, quand je me retournais dans mon lit à cause de la chaleur, des centaines de personnes s'écroulaient sur la Promenade des Anglais, tombaient sur la route, comme ça, en quelques secondes. Comme ça, quand je trouvais enfin le sommeil, des gens mourraient, tués par un homme, après avoir vu le feu d'artifice du 14 juillet, après avoir célébré la prise de la Bastille, la fin de la monarchie et des inégalités, le début de la révolution.

C'est incompréhensible.

C'est impardonnable.

C'est inimaginable.

Des hommes en tuent d'autres, comme ça, et aujourd'hui 84 personnes ne se sont pas réveillées, hier des centaines de personnes ont été interrompues dans ce qu'ils faisaient, dans leurs promenades, dans leurs discussions, à cause d'un homme qui a décidé de gâcher leurs vies, leur bonheur, c'est incroyable.

C'est trop.

Devant nos yeux écarquillés d'effroi, le monde s'écroule et les gens qui le détruisent sont autour de nous, on les a peut-être déjà croisés, je suis née égale à eux et pourtant ils tuent des gens comme moi.

Aucun mot n'exprimera la tristesse et la détresse qu'on aura ressenti, je crois.

Ella


 
 
 

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